Marguerite de Cortone (4/4)

4. La visionnaire

Marguerite de Cortone dans ses écrits ne cesse pas de nous décrire les abîmes de sa propre faiblesse et les sombres ornières de folie ou de crime qu’elle découvre en nous, avec une puissance d’exploration psychologique qui donne parfois une étrange saveur à telle des pages fidèlement transcrites d’après sa dictée.

Pas une de ses lettres qui ne révèle à un très haut point cette faculté étonnante de lire dans les âmes, d’y atteindre jusqu’aux replis les plus obscurs, et d’exposer impitoyablement au jour ce qui s’y trouve caché d’égoïsme ou d’hypocrisie, de mensonge envers les autres ou envers soi-même. Ou bien, lorsque enfin la visionnaire a obtenu de ses directeurs la permission, longtemps sollicitée, de s’affranchir de la société des hommes pour se livrer tout entière à ses entretiens avec le Christ, c’est alors dans une vue d’ensemble que se déploie devant elle le spectacle tragique des vices et des laideurs de notre humanité.

« Je souffre et je me plains ! lui dit Jésus… des célibataires, qui pèchent contre la pureté (…) des gens mariés, qui font abus du mariage, et vivent en luxurieux (…) des femmes, qui poussent la vanité jusqu’à ne s’occuper que de l’étalage de leurs robes et de leurs parures, et qui par leurs regards conduisent les hommes à pécher (…) des podestats et des gouverneurs qui, au lieu d’avoir les yeux tournés vers moi, ne cherchent que leur honneur terrestre ou l’acquisition de richesses… »
Et l’acte d’accusation se poursuit, minutieux et implacable…

Dès après sa mort Marguerite fut considérée comme sainte et la dévotion populaire faisait appel à elle pour obtenir des faveurs du ciel. Léon X permit à la ville de Cortone de célébrer une fête en son honneur. En 1623, Urbain VIII étendit cette permission à tout l’ordre franciscain. En 1728, Benoît XIII procèda à sa canonisation.

Chantal Auvray