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EDITO novembre

Paix et justice pour tous

L’agression barbare perpétrée par le Hamas le 7 octobre sur le territoire israélien a stupéfié le monde par son extrême sauvagerie, mais aussi par la soudaineté avec laquelle les puissances occidentales l’ont perçue ex nihilo, tant elles avaient fermé les yeux sur la dégradation de la situa-tion pourtant extrêmement tendue et douloureuse dans la bande de Gaza, soumise à un cruel blo-cus indifférencié depuis 2007, et dans les territoires occupés de la Cisjordanie où proliférait une colonisation agressive menée dans le mépris du droit et la violence à l’encontre des Palestiniens. La montée de la frustration, de la colère et de la haine aboutit à une fanatisation — islamiste d’un côté et ultra-orthodoxe de l’autre — qui trouva son débouché politique en livrant au Hamas la bande de Gaza puis à l’intégrisme juif le gouvernement d’extrême-droite de Netanyahu, chacun se nourrissant de l’autre dans une dialectique infernale où se justifie aujourd’hui l’injustifiable : terrorisme et apartheid, agression sauvage et vengeance aveugle.

Si le conflit israélo-palestinien a indéniablement une dimension religieuse, largement ampli-fiée par la loupe portée sur cette double fanatisation, il n’est cependant absolument pas réductible à celle-ci, contrairement à l’image promue par les médias dominants, poursuivis qu’ils sont par le fantasme d’un jihad triomphant d’une part, et par la culpabilité de siècles d’antisémitisme culminant dans la Shoah d’autre part. Car entre les marges idéologiques extrémistes à prétexte religieux, il y a des peuples, un seul peuple en vérité, d’êtres de chair et de sang qui n’aspirent qu’à la paix : des enfants, des femmes, des hommes qui veulent vivre, aimer, travailler, espérer et prier chacun dans sa foi, juive, chrétienne, ou musulmane, comme ils vécurent des siècles fraternellement avant que les colonisateurs européens vinssent se mêler de leur apprendre l’intolérance. Ainsi les musul-mans se montraient-ils infiniment plus accueillants et respectueux à l’égard des Juifs que l’Europe chrétienne qui les persécutait, et les Juifs se conformaient-ils aux lois de l’Alliance qui leur dic-taient : « L’étranger qui réside avec vous sera pour vous comme un compatriote et tu l’aimeras comme toi-même, car vous avez été étrangers au pays d’Égypte. Je suis l’Eternel votre Dieu. » (Lv,19.34). Et encore : « La terre ne sera pas vendue avec perte de tout droit, car la terre m’appartient et vous n’êtes pour moi que des étrangers et des hôtes. » (Lv, 25.23).

La vraie et seule cause du conflit est territoriale, car chacun doit pouvoir jouir d’un coin de terre en toute sérénité : le Palestinien qui ne peut accepter d’être chassé de sa maison comme le juif, qu’il ait toujours été son voisin ou qu’il soit venu chercher refuge contre les persécutions, sans oublier le chrétien — osons le rappeler — à qui l’on ne peut dénier son antiquité en Terre Sainte. Et si la cause est territoriale, alors la solution l’est aussi : elle passe peut-être par la création de deux États, si l’ultra-nationalisme du « Grand Israël » ne l’a pas rendue désormais impossible, en tout cas et de manière urgente et impérieuse par la restauration de la justice et des droits humains sans laquelle aucune paix n’est envisageable. C’est le sens du cri lancé par les patriarches de Jérusa-lem qui condamnent tout acte ciblant des civils (Vatican News) : « Nous appelons la communauté internationale à redoubler d’efforts pour négocier une paix juste et durable en Terre Sainte, fondée sur l’égalité des droits pour tous et sur la légitimité. »

L’occident redoute l’extension du conflit au nom du « choc des civilisations », théorie sus-pecte et très controversée d’origine états-unienne qui conduit au soutien inconditionnel d’Israël vu comme le poste avancé de la résistance au monde arabo-musulman. S’il est vrai que les puis-sances occidentales, les USA en tête, et celles du golfe persique instrumentalisent le conflit selon leurs propres intérêts, ceux-ci sont cependant aussi étrangers à la civilisation qu’à la paix. Car cet affrontement par délégation bloque toute résolution du conflit en entretenant l’État israélien dans une obtusité nationaliste qui bafoue impunément le droit international, et en ne proposant aux Pa-lestiniens que le désespoir qui attise les tentations du fanatisme malgré l’héroïque patience de l’Autorité palestinienne. Œuvrer pour la fin d’une guerre qui n’a que trop duré, c’est avant tout rompre avec cette instrumentalisation pour ne favoriser que les intérêts des Juifs et des Palesti-niens qui sont les mêmes : la paix, la justice et le respect des droits légitimes de tous.

Le comité de rédaction