Archives de catégorie : Prions en confinement

PRIONS EN CONFINEMENT SEMAINE_10

« Père très Saint, avec Saint François d’Assise nous te supplions.
Au nom de Jésus-Christ donne-nous ton Esprit.
Répands-Le sur tous les hommes, toutes les femmes, et tous les enfants,
Sur la Création toute entière.
Qu’Il chasse la pandémie et restaure les corps et les cœurs.
Nous te le demandons à Toi qui vis pour les siècles des siècles.
»

Prière composée par fr Michel Laloux, ministre provincial, en cette période de pandémie.

Cette réflexion se fera, sœurs et frères, tout en continuant l’appel à la prière.

La fidélité

Comme les autres thèmes abordés, la fidélité, pour le chrétien et le franciscain, n’est pas d’abord de l’ordre de la morale, elle est de l’ordre de la conformité.

Que nous dit la Bible ?
Elle nous dit, et c’est une constante, que Dieu est fidèle à lui-même. De toute éternité, Il a décidé d’aimer ses créatures, particulièrement sa créature spirituelle, l’homme, et rien ne pourra le dévier de sa trajectoire, même quand l’homme décide d’user de sa liberté pour aller dans le sens inverse et faillir à cette fidélité à laquelle il est appelée. Dieu ne cessera jamais de chercher l’homme, tout en lui laissant la liberté, c’est-à-dire sans s’imposer, risquant ainsi d’être rejeté.
L’Apocalypse nous donne une parole typique de la persévérance de Dieu et de son effacement : « Voici, je me tiens à la porte et je frappe. Si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai chez lui et je prendrai le repas avec lui et lui avec moi. » (3,20)
Une première conclusion s’impose : Pas de fidélité sans liberté.

Cette première conclusion amène une question :
Est-ce que nous ne risquons pas avec notre inconstance et nos infidélités de mettre à mal la fidélité de Dieu ?
Pour répondre à cette question, arrêtons-nous sur le passage de 2Tm. 2,11-13 :
« Voici une parole digne de foi : Si nous sommes morts avec lui, avec lui nous vivrons. Si nous supportons l’épreuve, avec lui nous régnerons. Si nous le renions, lui aussi nous reniera. Si nous lui sommes infidèles, lui reste fidèle, car il ne peut se renier lui-même ».
Il s’agit d’une hymne où s’exprime, dans un parallélisme, un certain rapport entre notre vie actuelle et le salut, une certaine réciprocité entre notre attitude à l’égard du Christ et celle du Christ à notre égard. Si nous le renions, il nous reniera. On s’attendrait alors, dans le dernier verset, à trouver le même balancement : si nous sommes infidèles, lui aussi sera infidèle.
Non. La logique se rompt pour nous amener à l’affirmation qui est le sommet du passage : Dieu demeure fidèle, car il ne peut se renier lui-même.
Pourquoi ?
L’étonnant dans ce passage, c’est que Dieu puisse renier mais ne puisse être infidèle à l’homme sans être infidèle à lui-même, se renier lui-même. Ce qui signifie que, dans ce reniement, Dieu est encore fidèle, fidèle à son alliance, fidèle à son amour, dans un respect infini de la liberté et de la responsabilité de son partenaire. Nous sommes ici devant la conséquence la plus importante de ce qui a été dit plus haut : dans sa fidélité, Dieu cherche l’homme sans le forcer. On peut user de notre liberté et lui dire non, mais personne ne peut faire que Dieu soit infidèle, que Dieu cesse d’être Dieu.

Mystère, la fidélité de Dieu est une réalité concrète. Il ne nous appartient pas de supprimer le mystère, mais de laisser Dieu nous y introduire. Et du même coup nous saisirons comment notre fidélité peut et doit être une constance et s’appuyer sur des habitudes qui se renouvellent constamment, en fonction des circonstances. Opter pour les mœurs de Dieu pour une plus grande conformité.

Et pour François d’Assise ?

Trois constantes : fidélité à soi-même, fidélité au Christ, fidélité à l’Eglise.

Fidélité à soi : Se convertir au Christ n’a jamais voulu dire chez François se renier. Mais comment, par la grâce du Très-Haut, mettre au service de l’Evangile ce qu’il est. Un exemple : Faut-il être sur les routes ou se retirer ? Marthe ou Marie ?
Pour François, résoudre le problème ne voulait pas dire supprimer l’une des deux réalités, mais de réaliser en lui l’unité. Il a mis sa nature à la disposition de la grâce, ce qui veut dire qu’il n’a pas dénié à la nature sa valeur positive. Autre exemple, il n’a étouffé ni sa sensibilité ni son imagination, ce qui nous a valu le Cantique de frère soleil.

Fidélité à Jésus : Tout grand amour impose une nouvelle échelle de valeurs, un rude travail sur soi-même pour trouver un nouveau style de vie, pour réorganiser sa vie intérieure.
La fidélité au Christ, pour François, consiste à « demeurer dans l’amour » (Jn.15, 9) et à « marcher dans l’amour » (2 Jn.4-6). Et c’est l’œuvre de toute une vie, puisque tous les jours Dieu appelle par une grâce nouvelle, et que tous les jours l’homme répond par une fidélité renouvelée. Tout l’itinéraire de François a été marqué par le dialogue initial de son chemin de Damas : la question était posé en terme de fidélité au service de Jésus (qui vaut-il mieux servir ?) et la réponse a été un engagement d’une disponibilité sans réserve (que veux-tu que je fasse ?)
En François, l’amour du Christ a ordonné tout le reste dans l’élan d’une fidélité sans partage.

Fidélité à l’Eglise : Être fidèle à l’Eglise, ne veut pas dire s’écraser devant elle : quand l’évêque le met à la porte, il rentre par une autre (2 C 147).
Quand il s’agit des grandes orientations de son Ordre, il a toujours recourt à l’Église : il présente ses 12 premiers frères, il soumet son projet de Règle.
Il faut lire la lettre à tous les clercs : équilibre admirable entre le rappel des devoirs et de la grandeur des clercs et la soumission respectueuse aux représentants de l’Eglise.

Quand le nombre des frères a augmenté, il a dû céder le particulier (son inspiration) devant le bien commun de l’Eglise. Il s’est vu comme une poule incapable de protéger sa couvée innombrable, alors il confie ses fils « à l’Eglise pour qu’elle les garde à l’ombre de ses ailes, les protège et les gouverne » (3 comp. 63).
Nous savons aussi que ce détachement ne s’est pas fait tout seul, sans lutte ; un jour, il s’était écrié : « Quels sont ceux qui m’ont volé mon Ordre et mes frères ? » (2C 188). Mais dans une perspective de foi et dans un réflexe de soumission à l’Eglise, il abandonne son œuvre à Jésus Christ qui lui avait dit : « Qui a planté l’Ordre des frères ? N’est-ce pas moi ? » (LP.86)

Pour finir, on peut dire qu’après avoir expérimenté lui-même « l’obéissance à base d’amour » (Adm.4), François comprend que c’est encore être fidèle à soi-même et au Christ que d’être fidèle à l’Eglise, même si on souffre par elle et pour elle : « Même s’ils me persécutaient, c’est encore à eux que je veux recourir » (Test.6).

frère Joseph – assistant régional

Prions en confinement semaine_9

« Père très Saint, avec Saint François d’Assise nous te supplions.
Au nom de Jésus-Christ donne-nous ton Esprit.
Répands-Le sur tous les hommes, toutes les femmes, et tous les enfants,
Sur la Création toute entière.
Qu’Il chasse la pandémie et restaure les corps et les cœurs.
Nous te le demandons à Toi qui vis pour les siècles des siècles.
»

Prière composée par fr Michel Laloux, ministre provincial, en cette période de pandémie.

Cette réflexion se fera, sœurs et frères, tout en continuant l’appel à la prière.

La fidélité

En couple, on se rend compte de la chance d’être ensemble et unis dans cette épreuve de pandémie qui est assez angoissante. Il y a des aspects positifs au confinement, par exemple : se retrouver tous les deux avec du temps libre, sans activités concrètes associatives et avec la possibilité de s’émerveiller sur l’éveil de la nature en ce printemps.
Par ailleurs, nous restons fidèles aux membres de la Fraternité et du CCFD-terre solidaire par téléphone, en veillant à prendre des nouvelles.
Pour la famille et les amis nous ressentons le lien qui s’est renforcé avec nos enfants et petits-enfants, qui nous appellent régulièrement au téléphone et de temps en temps par visio-conférence.
Au niveau de notre foi, nous avons la possibilité de suivre la messe à la télévision avec le Jour du Seigneur et les messes locales retransmises.
Cette crise renforce et fidélise nos convictions sur la nécessité de partager et sur l’attention à porter aux personnes les plus vulnérables, proches ou lointaines, ainsi qu’aux changements de vie à apporter dans la ligne de Laudato Si.

Ma relation à l’autre, expérience de fidélité…

Ce 17 mars 2020 restera en ma mémoire comme un couperet insolite, imprévu, poignant d’incertitude et masquant une certaine gravité de la situation : il fallait s’isoler, ne plus avoir de contact direct ou en groupes, « rester chez soi » !
Après quelques instants de stupeur, mon désir d’optimisme, de réaction à cette situation quelque peu déroutante et les conseils de plusieurs proches bienveillants me firent redécouvrir et apprécier les possibilités de contacts par le téléphone, le numérique et même les « vidéos » que je fréquentais difficilement auparavant ! …Expérience devenue heureuse dans la modernité ambiante même si cela ne remplace jamais le « en chair et en os » !
Cette situation nouvelle m’a fait réfléchir sur l’importance de ma relation à l’autre et combien cet « autre » m’est une force vive et devient, par sa fidélité, essentiel et précieux dans ce contexte si particulier- par nécessité sanitaire – de restriction des relations collectives.
Les coups de fil, sms, mails, signes d’affection de famille, fraternité, amis, et parfois des manifestations insoupçonnées de relations anciennes avec qui je n’avais pas eu de nouvelles depuis des lustres, tous ces appels réciproques me furent une vraie présence, touchante, riche d’échanges de ressentis et de compassion, de liens fraternels et de signes de confiance établis entre nous.
Les coups de sonnette de voisins habituellement très discrets se proposant de me faire quelques courses, de rapporter du pain, ou même demandant mon aide pour confectionner des masques, les douces connivences initiées à 20h chaque soir par les applaudissements sur les balcons, me mirent à l’évidence que ces nouvelles relations instauraient aussi un élan de fidélité original et de qualité certaine !
En toute rencontre, la « contagion » de ce que m’apporte l’autre me modèle le cœur et l’être, me transforme et sans cesse, instille que je suis en commencement, en création grâce à ce qu’il forge en moi et parfois me burine à travers nos échanges. Ainsi la constance de la relation, des sentiments me fait ressentir combien j’ai besoin de lui et constitue un soc qui me structure dans sa fidélité. Sans doute aussi fais-je l’expérience intime de l’Amour de Dieu présent en cette évolution permanente en moi que produit la réciprocité de ma relation à Lui et aux autres…
A quoi cela m’entraîne-t-il pour « l’après », en quoi puis-je évoluer face à ce nouveau contexte qui nous attend ?
Sans doute, à redonner du sens, du temps à la relation…à apprendre à mieux écouter ce que je n’entendais plus, à retrouver en certains autres de nouvelles oasis dans leurs capacités à me surprendre et à me sortir de la routine, à accepter un détachement de mes idées ou de ce à quoi je tiens le plus, fondamentalement, en ouvrant mon regard à la puissance d’autres valeurs qui me semblaient pauvres ou faibles, en un mot à redécouvrir l’autre dans sa capacité d’amour qu’il me propose en chaque rencontre !
Comment ne pas rendre grâces au Seigneur de ces cadeaux inattendus de fidélités humaines qui meublent de joyeuse reconnaissance ma prière et m’ouvrent un chemin de Foi !
Loué sois-Tu mon Seigneur pour ces fidélités redécouvertes, source de richesses à venir et reflet de la fidélité de Ton amour en chacun de nous !

Prions en confinement Semaine_8

« Père très Saint, avec Saint François d’Assise nous te supplions.
Au nom de Jésus-Christ donne-nous ton Esprit.
Répands-Le sur tous les hommes, toutes les femmes, et tous les enfants,
Sur la Création toute entière.
Qu’Il chasse la pandémie et restaure les corps et les cœurs.
Nous te le demandons à Toi qui vis pour les siècles des siècles.
»

Prière composée par fr Michel Laloux, ministre provincial, en cette période de pandémie.

Cette réflexion se fera, sœurs et frères, tout en continuant l’appel à la prière.

La joie

La joie de saint François suppose plusieurs termes : joie, émerveillement, louange, action de grâce. Ce point est central dans la spiritualité de François et par conséquent de la nôtre. Comme pour l’humilité, l’émerveillement ou la minorité, la joie de François s’enracine en Dieu. Il est un émerveillé de Dieu. Il est fasciné par Dieu. Il suffit de lire les « Louanges de Dieu » pour s’en convaincre. Et sa joie ne peut s’expliquer que par cette fascination.
Mais, on ne peut être fasciné par quelqu’un ou quelque chose que si on a fait l’expérience de ce quelqu’un ou de cette chose.
François a fait l’expérience de Dieu. Ce qu’on appelle dans le langage religieux, un homme mystique. (Attention : la mystique n’est pas réservée à une élite que la hiérarchie décrète en tant que telle. La mystique est la certitude de Dieu présent à ma vie, avec tout ce que ce mot, certitude, porte de poids et de conséquences). Il a fait l’expérience de ce Dieu trois fois Saint, le Tout-Autre, qui se penche sur ce vermisseau qu’il est. Il a fait l’expérience de ce que Dieu fait pour lui (avant de se demander ce qu’il fait, lui, pour Dieu). D’où sa fascination et sa joie inébranlable.

Il est vrai que François est un homme joyeux par tempérament. Mais cela seul ne suffit pas à expliquer cette joie indéracinable. C’est ce qu’il écrit au début de son testament : « Au temps où j’étais encore dans les péchés, la vue des lépreux m’était insupportable. Mais le Seigneur me conduisit parmi eux ; je leur fis miséricorde ; et au retour, ce qui m’avait semblé si amer s’était changé pour moi en douceur pour l’esprit et pour le corps » (Test. 1b-3a) ; ou « la joie parfaite » en Fioretti 8, même si, humainement, elle est un peu masochiste.

Ce n’est pas non plus par naïveté : tout le monde, il est beau, tout le monde, il est gentil. C’est une démarche plus profonde qui relève de la Bonté même de Dieu, le Roi des rois, et comme le disait un frère qui a déjà rejoint le Seigneur, Jean-Joseph Buirette, il voyait en toute créature humaine « une virtualité princière » comme condition et comme destinée. Et cela le remplit d’allégresse.
Cela suppose, avant tout, une expérience de Dieu, pas n’importe lequel, mais le Dieu sauveur, et cela quotidiennement. Après le dépouillement devant son père au tribunal de l’évêque, c’est comme une explosion de joie qui lui fait dire : « désormais je puis dire, non pas mon père Pierre Bernardone, mais notre Père qui es aux cieux ». C’est la joie d’un pauvre qui est sûr de pouvoir manger tous les jours dans la main de son Père, dans la main de son Dieu. La joie de la présence quotidienne du Père nourricier. D’après Celano 2, 77, François donnait à Dieu le titre de : « Grand Aumônier ». Et Chesterton écrit dans son livre sur saint François : « Tous les biens semblent meilleurs quand ils prennent figure de dons. »

Il est remplit d’une joie insondable devant le miracle de l’existence des choses : « Qui pourrait nous décrire la douceur inondant son âme lorsqu’il retrouvait dans les créatures la sagesse, la puissance et la bonté du créateur ? A contempler le soleil, la lune, le firmament et toutes ses étoiles, il se sentait monter au cœur une joie ineffable. » 1C. 80

Il y a aussi la joie de l’identification au Christ : dans l’évangile de la saint Mathias, entendu à la Portioncule, François découvre une voie vivante de salut. Il découvre la condition humaine du Christ pauvre. Cela le transporte de joie et il s’écrie : « Voilà ce que je veux, voilà ce que je cherche, ce que, du plus profond de mon cœur, je brûle d’accomplir » (1C 22).

J’ai écrit plus haut par rapport à « la joie parfaite » qu’elle est humainement masochiste. Mais ce qu’il nous dit ne peut être compris que dans sa volonté de s’identifier au Christ qui a été incompris, rejeté, maltraité, crucifié.
Le frère Ignace-Etienne Motte résumait ce passage des Fioretti de la façon suivante : « O frère Léon, s’il nous arrive de vivre des moments où tout s’acharne à nous enfoncer dans la tristesse et si, ayant perdu tout motif raisonnable d’être joyeux, nous nous apercevons cependant que notre joie résiste et demeure inébranlable, alors, oui, nous pourrons dire que nous avons découvert au cœur de notre vie la source de la véritable joie ».

Pour finir avec ce rapide aperçu de la joie de François, il faut parler de sa mort.
La légende de Pérouse, 64, nous rapporte cette phrase de François qu’il adresse à frère Elie : « Frère, laisse-moi me réjouir dans le Seigneur et chanter ses louanges au milieu de mes infirmités : par la grâce du Saint Esprit je suis si étroitement uni à mon Seigneur que, par sa bonté, je puis bien me réjouir dans le Très-Haut lui-même ! ». Il évoquait avec lui l’imminence de sa mort.

Juste avant sa mort, François demande qu’on lui amène du pain, qu’on lui lise le passage de saint Jean : « Six jours avant la Pâque, Jésus sachant que l’heure était venue de passer de ce monde à son Père…». Et François rompt le pain et le distribue à ses frères. Puis il se fait déposer nu sur la terre nue. Il demande qu’on le laisse nu, « le temps nécessaire pour parcourir un mille à pas lent ». Il meurt là.
François a voulu célébrer sa mort à la manière de Jésus, par l’évocation du Jeudi Saint et du Vendredi Saint : Jésus a été dépouillé de ses vêtements avant d’être mis sur la croix. Celano écrit : « L’heure vint enfin où, tous les mystères du Christ s’étant réalisés en lui, son âme s’envola dans la joie de Dieu » (2, 217).

Il y a dans l’épisode de sa mort, une joie très profonde qui est le couronnement de sa joie parfaite. La grâce de pouvoir, au moment même de sa mort, être identifié à Jésus.

fr. Joseph – assistant régional

Prions en confinement semaine_7

« Père très Saint, avec Saint François d’Assise nous te supplions.
Au nom de Jésus-Christ donne-nous ton Esprit.
Répands-Le sur tous les hommes, toutes les femmes, et tous les enfants,
Sur la Création toute entière.
Qu’Il chasse la pandémie et restaure les corps et les cœurs.
Nous te le demandons à Toi qui vis pour les siècles des siècles.
»

Prière composée par fr Michel Laloux, ministre provincial, en cette période de pandémie.

Cette réflexion se fera, sœurs et frères, tout en continuant l’appel à la prière.

La joie

Peut-on être triste et affirmer en même temps que nous sommes franciscains ?
Comme la minorité, la joie est constitutive de notre spiritualité.
Mais de quelle joie parlons-nous ?
Je laisse pour commencer la parole à des sœurs et des frères pour témoigner de leurs expériences.

frère Joseph (assistant régional)

Après l’annonce du confinement le 15 mars; la première semaine a été très difficile, très angoissée et la peur de la maladie, de mourir, peur de l’inconnu, de perdre pieds et de ne plus rien maitriser m’envahissait. 😪
Je regardais sans cesse les nouvelles sur l’évolution du virus et J’ai fini par lâcher prise!!!!!
Mes joies sont simples. La première est d’avoir remonté la pente et de donner du sens au quotidien, cela reste quand même un travail de chaque instant….
Les appels donnés ou reçus par la famille, on se rend compte dans ces moments là que le lien et l’affection sont bien présents. Les échanges sont simples et vrais ou chacun se livre davantage.
L’attention que l’on se donne entre voisins est rassurante, on n’est pas seul. Je retrouve le plaisir du jardinage avec une voisine. L’envie de mettre des fleurs,🌻 de la couleur….Profiter du soleil ☀️
Les applaudissements le soir à 20H créent des liens, échange de livres avec une voisine. Une enfant de 3ans qui tous les soirs me souhaite « bonne nuit »; pour elle c’est devenu un rite avant le coucher. Si je continue à aller à ma fenêtre tous les soirs, c’est bien pour elle.
Cette semaine, j’ai repris mes activités au resto du cœur, plaisir de retrouver les autres bénévoles et les familles.
Avec les précautions prises, la tâche est plus compliquée et demande un gros travail de préparation.
Les bénéficiaires sont de plus en plus nombreux.
Les verbes, Ecouter, Regarder, Echanger, Prendre soin, Faire ensemble ont été source de joie pour moi.

Quelle est ma joie aujourd’hui, alors que des milliers de personnes meurent chaque jour dans le monde de ce méchant virus qui nous met pare terre ? Alors que le confinement, mesure de protection indispensable, coupe les liens charnels entre les personnes et aggravent les solitudes déjà lourdes à l’état ordinaire de la vie, avec tous les drames à venir qui se profilent avec des angoisses qui émergent déjà.
Chaque jour, même quand mes vieux os se font douloureux au réveil, une indicible paix et tranquillité qui vient de très loin me font sourire à la vie de ce jour nouveau.
Je regarde le ciel bleu de ma fenêtre, j’entends les oiseaux chanter plus qu’à l’ordinaire, je contemple la nature qui s’éveille en ce printemps pas comme les autres et cela me réjouit. J’écoute la vie qui vient des habitants du voisinage et de la cour, et j’aime ces signes de vie. Le téléphone sonne et mes enfants ou amis sont là pour prendre ou donner des nouvelles ; les réseaux sociaux me permettent aussi de rester en contact de visu avec eux.
J’entends à la radio des nouvelles réjouissantes de solidarités qui se mettent spontanément en place, du personnel médical ou soignant à la retraite qui reprennent du service, et des bénévoles qui se mettent au service de leurs concitoyens en difficulté de tout genre.
Comment ne pas rendre grâce pour cette présence et sollicitude bienveillante ? Je sais que le Seigneur est présent en chacun de nous et nous inonde de son amour inlassablement. Il est la source de toute cette bienveillance et générosité.
Alors oui, même dans ce monde en crise, j’ai une joie profonde au fond de mon cœur, qui me fait chanter un refrain de John Littleton que j’ai chanté il y a bien longtemps :
« J’ai envie de chanter car mon cœur est heureux
J’ai envie de chanter mon Dieu
J’ai envie de te dire la joie dans mon cœur
Et de chanter pour toi Seigneur
Le bonheur qui m’étreint
Est si grand aujourd’hui
J’ai envie de te dire merci
Dans la clarté du jour
Tu m’as pris par la main
Et je chante tout au long du chemin »

La France entière est confinée. Malheureusement, une fois encore, il y a ceux qui tirent leur épingle du jeu mieux que les autres. Je pense aux familles qui vivent entre quatre murs, avec trop de monde dans la maison et sans jardin. Moi, j’ai la joie d’être dans la campagne profonde et de pouvoir me promener quand je veux, sans attestation de déplacement. En ouvrant la porte de la salle à manger tôt le matin, je goûte le concert des oiseaux dans la forêt, qu’une jolie brume enveloppe. Comme chaque année, je reste sidérée du miracle du printemps, qui fait advenir en quelques semaines une ramure verdoyante, en lieu et place d’un désert gris. Ce renouveau est le signe que Dieu donne chaque fois avec largesse, sans se soucier de nos mérites et qu’il aime à recommencer ce don sans se lasser. Comme une nouvelle chance éternellement offerte. Alors bien sûr, cette joie sensible, immédiate, ne dure pas. Les préoccupations du jour, les inévitables frottements de la vie commune, même dans un cadre idyllique, ont raison d’elle. Cent fois par jour peut-être. Quand mon cœur s’agace, s’enflamme, qu’il se remplit d’un reproche intérieur ou formulé, la tristesse vient en général tout de suite après. Il y a alors ce fameux choix. Rester dans la mort ou revenir à la vie. Qu’il coûte, ce choix ! Mais quand on choisit d’aller chercher auprès de Dieu, au fond de nous, le pardon à soi-même et à l’autre et la force de l’exprimer à demi-mots ou par un geste, la joie revient, plus profonde et libératrice. Celle de la communion et de la paix intérieure retrouvée. Dans le confinement de notre cœur, c’est la plus grande bataille qui se joue, la seule qui compte en fait. Et qu’elle a de prix, cette joie-là, qu’il faut reconquérir sans cesse ! Alors bien sûr, nous savons qu’en ligne de mire, il y a encore mieux. Il y a cette joie dont parle François à ses frères, qui nous évite même de passer par la phase de la colère et du découragement. Cette joie parfaite, qui nous fait supporter patiemment et avec allégresse les vicissitudes et les injustices de la vie, en pensant aux souffrances du Christ béni. Il faut sans doute une vie entière pour y parvenir. Mais quel but désirable !

Parler de la joie ? Membre d’une fraternité franciscaine séculière, attiré et inspiré par la manière de François d’Assise de vivre l’évangile de Jésus, mon Seigneur, devrais-je être en joie parce qu’il a décrit ce qu’est pour lui la joie parfaite ? Certainement pas ! Que Dieu nous garde d’être des clones insipides du saint d’Assise. D’ailleurs, comme le relate si bien Eloi Leclerc dans « Sagesse d’un pauvre », François d’Assise a parfois été loin de vivre cette joie parfaite au cours de son existence. Alors, suis-je moi-même joyeux ? Mais, est-ce à moi de répondre ou bien les autres peuvent-ils constater que je le suis, ou ne le suis pas ?
En évoquant la joie, il me vient à l’esprit l’idée de légèreté. Non pas insouciance, mais légèreté qui s’oppose à ce qui est pesant, plombant, lourd, grave, à ce qui nous attache aux choses matérielles (d’ailleurs, la gravité – la force gravitationnelle – nous ramène toujours à la terre). Mais je peux expérimenter que cet apprentissage, lent et difficile, du détachement par rapport aux choses matérielles rend libre pour se réjouir de ce qui se fait de beau et de bon pour et par les autres. Se réjouir de voir la croissance d’un petit enfant dans sa découverte de la vie, des découvertes scientifiques qui conduisent à une plus grande compréhension du monde, du geste gratuit, de l’engagement – professionnel ou bénévole – dans un esprit de service des autres, pour la paix et la justice.
Cette joie-là est une joie intérieure, discrète, qui repose sur la confiance. Confiance en cet Autre, si mystérieux et pourtant si proche, au plus intime de moi-même, et vers lequel je ne cesse d’être en quête. C’est une joie qui me relie aux autres, les proches et les moins proches, car je prends de plus en plus conscience que nous sommes fondamentalement des êtres de relation et que la vie est relation. Elle nous mène à vibrer en résonance avec les joies et les épreuves que vivent nos frères et nos sœurs.
Alors, cette joie-là transparaît-elle pour les autres ? Je ne sais pas. Peut-être sous la forme d’un certain humour qui ne se prend pas trop au sérieux et qui est une manière pudique de dire aux autres qu’on les aime. J’espère pouvoir être dans cette disposition de joie confiante si, demain, frère coronavirus me désigne comme le prochain invité à louer le Seigneur pour notre sœur la mort corporelle.

Prions en confinement Semaine_6

« Père très Saint, avec Saint François d’Assise nous te supplions.
Au nom de Jésus-Christ donne-nous ton Esprit.
Répands-Le sur tous les hommes, toutes les femmes, et tous les enfants,
Sur la Création toute entière.
Qu’Il chasse la pandémie et restaure les corps et les cœurs.
Nous te le demandons à Toi qui vis pour les siècles des siècles.
»

Prière composée par fr Michel Laloux, ministre provincial, en cette période de pandémie.

Cette réflexion se fera, sœurs et frères, tout en continuant l’appel à la prière.

La minorité

Elle fait partie de notre ADN franciscain, et cela dès le début de l’Ordre :
« C’est lui (François) qui fonda l’Ordre des Frères Mineurs, et voici en quelle occasion il lui donna ce nom. La Règle comportait cette phrase : ‘Qu’ils soient petits’ ; or, un jour qu’on lisait la Règle, il interrompit : ‘je veux que notre fraternité s’appelle l’Ordre des Frères Mineurs.’
Et de fait, ils étaient ‘mineurs’, soumis à tous, ils cherchaient la dernière place et l’emploi méprisé qui pourrait leur valoir quelque avanie ; ce faisant, ils voulaient asseoir sur les solides fondations de la véritable humilité l’édifice spirituel qui grouperait en une heureuse architecture l’ensemble des vertus. » (1C. 38)

Être mineur, c’est se faire le plus petit pour être en position de servir les autres ; non pas pour le plaisir d’être au dernier rang… mais pour être plus apte à rendre service (aucune vertu ne vaut pour elle-même, si elle n’est pas fille de la charité). La minorité touche donc toutes les situations de la vie :

La vie commune :
« … au contraire, par esprit d’amour, qu’ils (les frères) se rendent volontiers service et s’obéissent mutuellement » (1R.5, 14)
Et particulièrement avec les malades :
« Si un frère, où qu’il soit, tombe malade, les autres frères ne le quitteront pas avant d’avoir désigné un frère – ou plusieurs s’il le faut – pour le servir comme ils voudraient eux-mêmes être servis. » (1R. 10, 1)

En position de responsabilité :
« Ce n’est pas pour être servi que je suis venu, dit le Seigneur, mais pour servir. Quand on a reçu autorité sur les autres, on ne doit pas plus en tirer gloire que si l’on était affecté à l’emploi de leur laver les pieds. » (Adm. 4, 1-2)

Dans le milieu du travail :
« …mais il (le frère) se fera petit et soumis à tous ceux qui habitent la même maison. » (1R. 7, 2)

Dans les rapports avec l’Eglise :
«… afin que, demeurant toujours soumis à cette même Eglise et prosternés à ses pieds, stables dans la foi catholique, nous observions la pauvreté, l’humilité et le saint Evangile de notre Seigneur Jésus Christ, comme nous l’avons fermement promis. » (2R. 12, 4)

Dans les rencontres fortuites :
« Ils doivent se réjouir quand ils se trouvent parmi des gens de basse condition et méprisés, des pauvres et des infirmes, des malades et des lépreux, et des mendiants des rues. » (1R.9, 2)

Cette manière d’être in fine, a un but spécifique, celui de l’annonce de la Bonne Nouvelle :
«… ou bien, ne faire ni procès ni disputes, être soumis à toute créature humaine à cause de Dieu, et confesser simplement qu’ils sont chrétiens » (1R.16, 6)

En conclusion, l’utopie proposée par François à chacun, c’est d’être un signe, un sacrement du Christ serviteur de ses frères et de ses sœurs, allant jusqu’à donner sa vie pour eux.

Frère Joseph – assistant régional

Prions en confinement Semaine_5

« Père très Saint, avec Saint François d’Assise nous te supplions.
Au nom de Jésus-Christ donne-nous ton Esprit.
Répands-Le sur tous les hommes, toutes les femmes, et tous les enfants,
Sur la Création toute entière.
Qu’Il chasse la pandémie et restaure les corps et les cœurs.
Nous te le demandons à Toi qui vis pour les siècles des siècles.
»

Prière composée par fr Michel Laloux, ministre provincial, en cette période de pandémie.

Cette réflexion se fera, sœurs et frères, tout en continuant l’appel à la prière.

La minorité

C’est un élément constitutif de la spiritualité franciscaine. Mais, comment est-elle comprise ? Comment est-elle vécue ? Est-il si évident que cela de vivre la minorité ?
Je laisse la parole à des sœurs et frères de nos fraternités pour répondre à ces questions. Voici le témoignage de 4 d’entre eux. J’ai retiré les noms par discrétion.

Frère Joseph (assistant régional)

Témoignage N°1

Spontanément quand j’entends minorité je pense petit, humble ..
En allant plus loin il me vient l’image du Christ lavant les pieds de ses disciples, donc quand j’entends minorité c’est service, abaissement qui résonnent. St François écrivait « … Que tous les frères n’aient en cela aucun pouvoir ni domination surtout entre eux » (1R 5,9), en résonnance avec ce qui est écrit dans l’Evangile … « que celui qui est le plus grand parmi eux devienne comme le plus petit », « je suis au milieu de vous comme celui qui sert » (Luc 22, 27)
C’est cela que j’essaye de vivre au quotidien. Dans ma mission d’aumônier d’hôpital mon objectif était de vivre le plus en vérité auprès des personnes malades : me mettre à leurs pieds, m’abaisser et les écouter ; ainsi cela colorait ma prière et me rendait humble. J’ai à cœur aussi de prendre conscience que tout vient de Dieu, que chacun est un don de Dieu ; cela m’invite donc à rester à ma juste place et m’empêche de tout pouvoir. C’est ainsi que j’ai vécu les responsabilités quand elles m’ont été demandées.
C’est aussi une école de vie et cela n’est pas si évident !
Apprendre à discerner le nécessaire, à se débarrasser au maximum du superflu que ce soit dans la vie pratique que dans l’attention à l’autre est un combat à reprendre chaque jour.
Apprendre aussi à me taire, moi qui aie du mal à ne pas dire les choses comme je les pense, est une conversion vers laquelle je tends …mais je suis loin encore d’y arriver.

Témoignage N°2

Voilà un mot qui n’est pas au Top 50 des valeurs de notre société. I l faut être un peu fou, comme François pour se prévaloir de ce beau titre : Frère mineur.
Et ce n’est pas toujours facile de rester mineur quand on a des responsabilités. J’ai été directeur général de maisons d’enfants que j’ai créées. Responsabilités au service des jeunes accueillis que j’ai toujours voulu considérer comme des petits frères, des personnes en devenir. Responsabilités au service de mes salariés. Pas facile de rester « mineur » quand on a de tels pouvoirs et la tentation est grande de les exercer sans discernement. Il me faut sans cesse me rappeler que ces responsabilités, ces pouvoirs sont un don de Dieu dont je dois rendre grâce et qui doivent rester au service du frère..
Diacre permanent, avec des responsabilités ecclésiales, et frère mineur, je me dois d’être doublement au service de mes frères en luttant sans cesse contre l’orgueil d’être ceci ou cela.
Quand je suis en mer, sur mon voilier, je ne peux que m’émerveiller devant la création divine, et je me sens également petit, mais responsable, devant elle et Celui qui l’a créée.
« Garde-nous tous petits devant ta face…
Garde-nous tous petits devant nos frères…
»

Témoignage N°3

La minorité peut, paradoxalement ne venir qu’après la majorité. Ma majorité légale atteinte, mais surtout celle d’une conscience qui tire ses sources dans les engagements de mes jeunes années et une (re)découverte de Saint François, j’ai pu de temps à autre réussir à toucher cette minorité.
J’ai eu besoin d’être grand pour mieux redevenir petit !
J’ai d’abord ressenti le besoin de me hisser de peur de tomber, mais j’ai toujours gardé en moi une profonde aversion pour cette course effrénée au « toujours plus », ce que les anglo-saxons nomment très justement la « course des rats ». C’est à ce moment que l’on peut s’arrêter et regarder derrière soi. Alors, on y voit une multitude de personnes qui peinent à gravir la marche inégale au-dessus d’eux.
Que faire ? Continuer son chemin sans s’en soucier ? Certains le font par aveuglement. La plupart éprouveront un sentiment coupable et hésiteront. D’autres enfin feront ce choix de la minorité et aideront celui derrière à se hisser auprès de nous. Et s’il nous dépasse ? Ayons la satisfaction de l’avoir aidé à un moment difficile pour lui; cela l’aidera à faire lui aussi ce choix pour un autre.
Je me retrouve plus fréquemment dans la seconde posture, mais lorsque je force ce pas, je ressens cette joie intérieure qui m’envahit!
Visons cette sobriété heureuse dont parle si justement Michel Sauquet.
Des gestes simples permettent de gravir cet autre sommet, armé de bienveillance et de cette minorité, qui si étrangement, nous aide à grandir.

Témoignage N°4

Tenter de vivre la « minorité »
Deux évènements me viennent de suite à l’esprit pour me guider sur cette voie, qui me la montrent comme source de relation féconde et donc de joie profonde…
En cette octave pascale, l’image du Christ lavant les pieds de ses disciples s’impose à moi et je réentends son message comme un commandement à suivre : « C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous ». (Jn 13, 15)
La deuxième image est celle de Saint François prenant soin du lépreux « d’âme et de corps » qui a découragé tous les frères : « ce que tu voudras, je le ferai » (Fioretti de St François)
Deux exemples de relations aux autres en attitude de minorité : se mettre à la portée de l’autre, par la parole et le geste.
Difficile à suivre quand on est « riche » ; pas seulement riche de biens matériels, mais peut-être encore plus riche de savoir-faire, de culture, d’aisance orale ou écrite, de connaissances… Nos certitudes peuvent fermer le dialogue, biaiser la relation, envers les plus pauvres que nous rencontrons mais aussi envers nos plus proches, famille et amis. Même sans le vouloir, c’est tellement facile de faire ressentir à l’autre ses manques et ses imperfections…
Oui, nous venons vers l’autre avec tout ce que nous sommes, en particulier tous ces talents et capacités, mais aussi avec la conscience de nos faiblesses et travers … alors rendons grâce à Dieu pour la merveille que nous sommes, rendons-Lui la grâce de ce qui a été vécu et devant Lui, reconnaissons notre propre fragilité.
Vivre la minorité, se serait mettre chaque matin notre confiance en Dieu, pour le laisser guider nos actions et savoir entendre la vérité de ceux que nous rencontrons.

Prions en confinement Semaine_4

« Père très Saint, avec Saint François d’Assise nous te supplions.
Au nom de Jésus-Christ donne-nous ton Esprit.
Répands-Le sur tous les hommes, toutes les femmes, et tous les enfants,
Sur la Création toute entière.
Qu’Il chasse la pandémie et restaure les corps et les cœurs.
Nous te le demandons à Toi qui vis pour les siècles des siècles.
»

Prière composée par fr Michel Laloux, ministre provincial, en cette période de pandémie.

Cette réflexion se fera, sœurs et frères, tout en continuant l’appel à la prière.

L’émerveillement

François n’est pas un benêt qui est en admiration devant la nature et les personnes pour elles-mêmes. Il n’est ni un écologiste, ni un humaniste tels qu’on comprend ces termes aujourd’hui. Le créé, pour lui, est un lieu de révélation :

« … il savait puiser un grand réconfort dans toutes les choses de ce monde ; il les utilisait … comme autant de miroirs pour contempler la bonté de Dieu. En toute œuvre, il admirait l’Ouvrier ; il référait au Créateur les qualités qu’il découvrait à chaque créature. Il se réjouissait pour tous les ouvrages sortis de la main de Dieu et de ce spectacle qui faisait sa joie, il remontait jusqu’à celui qui est la cause, le principe et la vie de l’univers. Il savait, dans une belle chose, contempler le Très Beau ; tout ce qu’il rencontrait de bon lui chantait : ‘Celui qui m’a fait, celui-là est le Très Bon.’ Il poursuivait à la trace son Bien-Aimé en tout lieu de sa création, se servant de tout l’univers comme d’une échelle pour se hausser jusqu’au trône de Dieu. » (2C.165)

Et cela a une conséquence sur son émerveillement :

L’émerveillement de François est enraciné en Dieu : il le voit à l’œuvre en tout et en tous, et cette œuvre n’est pas une réalité du passé, elle est une action actuelle, permanente de Dieu créateur et sauveur :

« Aimons tous le Seigneur Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme, de tout notre esprit, de tout notre pouvoir et courage, de toute notre intelligence, de toutes nos forces, de tout notre effort, de toute notre affection, de toutes nos entrailles, de tous nos désirs, de toutes nos volontés. Il nous a donné et nous donne à tous le corps, l’âme et la vie ; il nous a créés et rachetés ; il nous sauvera par sa seule miséricorde ; qui à nous misérables et miséreux, putrides et fétides, ingrats et mauvais, nous a fait et nous fait tout bien. » (1R. 23, 8)

« Tout puissant, très saint , très haut et souverain Dieu, Père saint et juste, Seigneur, roi du ciel et de la terre, nous te rendons grâces à cause de toi-même, parce que, par ta sainte volonté, et par ton Fils unique avec le Saint-Esprit, tu as créé toutes choses, spirituelles et corporelles ; tu nous as faits à ton image et ressemblance, tu nous as placés dans le paradis ; et nous, par notre faute, nous sommes tombés » (1R. 23, 1-2).

Son émerveillement est enraciné en Christ, puisqu’il est l’alpha et l’oméga de tout : François le voit avant toute création, mais aussi présent aujourd’hui, comme il est le terme de tout le créé :

« Nous te rendons grâces parce que, de même que tu nous as créés par ton Fils, de même, par le saint amour dont tu nous as aimés, tu as fait naître ton Fils, vrai Dieu et vrai homme, de la glorieuse Vierge sainte Marie, et, par sa croix, son sang et sa mort, tu as voulu nous racheter de notre captivité. Et nous te rendons grâce parce que ce même Fils reviendra dans la gloire de sa majesté. » (1R. 23, 3-4a)

C’est lui qui donne sens et grandeur à tout le crée. Et quand il s’agit de la créature spirituelle, l’être humain, le Christ devient « l’archétype » et lui donne toute sa splendeur :

« Considère, ô homme, le degré de perfection auquel t’a élevé le Seigneur : il a créé et formé ton corps à l’image du corps de son Fils bien-aimé, et ton esprit à la ressemblance de son esprit » (Adm 5, 1).

L’émerveillement de François va aussi du côté de ses frères. Il suffit de se rappeler sa manière de décrire le frère parfait, rapporté par l’auteur du « miroir de perfection » 85.

Il découvre dans tout ce que l’homme dit et fait de bien, de beau, de bon, celui qui seul est Bien, Beau et Bon :

« Un frère lui demanda un jour pourquoi il mettait tant de soin à recueillir même les écrits des païens où l’on ne trouve pas le nom du Saigneur ; il répondit : ‘Mon fils, c’est parce qu’on y trouve les lettres qui composent le très glorieux nom du Seigneur Dieu. Tout ce qu’il y a de bien dans ces écrits n’appartient ni aux païens ni à qui que ce soit, mais à Dieu seul, de qui nous vient tout bien’. » (1C 82)

Frère Joseph (assistant régional)

Prions en confinement Semaine_3

« Père très Saint, avec Saint François d’Assise nous te supplions.
Au nom de Jésus-Christ donne-nous ton Esprit.
Répands-Le sur tous les hommes, toutes les femmes, et tous les enfants,
Sur la Création toute entière.
Qu’Il chasse la pandémie et restaure les corps et les cœurs.
Nous te le demandons à Toi qui vis pour les siècles des siècles.
»

Prière composée par fr Michel Laloux, ministre provincial, en cette période de pandémie.

Cette réflexion se fera, sœurs et frères, tout en continuant l’appel à la prière.

Christ est ressuscité, Il est vraiment ressuscité, Alléluia !

Continuons notre réflexion en regardant cette semaine du côté de l’émerveillement.

« Franciscain(e)s, nous pouvons aussi nous émerveiller de toutes les initiatives prises ici où là pour venir en aide aux plus démunis dans cette période qui les frappe de plein fouet. Nous émerveiller pour nos concitoyens qui ont compris le message et respectent les consignes officielles (ils sont très majoritaires). Nous émerveiller surtout de l’incroyable dévouement des membres du personnel soignant, allant jusqu’au bout de leurs forces pour endiguer l’épidémie et guérir ceux qui peuvent l’être ». (Michel Sauquet – édito)

Je commence en disant que, contrairement à ce qu’on croit, l’émerveillement ne va pas de soi. Et je précise : la capacité d’émerveillement devant un monument, une nature, une personne, s’étiole au fur et à mesure que je la / le vois, que je la / le rencontre pour disparaître avec le temps.

Un touriste qui arrive à Paris pour la première fois et s’arrête devant l’obélisque de la place de la concorde est en admiration devant ce monument, il s’émerveille devant la précision de ce travail d’orfèvre que représente ce gigantesque bloc de pierre. Mais le Parisien qui passe devant quotidiennement ne lui prête même pas un regard. Le danger de l’habitude.

D’ordinaire, il nous est plus facile de nous émerveiller de la nature que de notre sœur ou frère en humanité que nous croisons quotidiennement. Je dirai même, d’une façon générale, cela ne nous vient même pas à l’esprit. Il faut des situations particulières,

Et voilà que ce temps de confinement nous invite à garder l’esprit vif et poser un autre regard, un regard neuf, sur celles et ceux qui nous entourent, comme l’écrit Michel Sauquet,

S’émerveiller implique des conditions :

La première, c’est échapper à l’habitude, c’est, pour utiliser un langage qui nous est commun, retrouver « l’esprit d’enfance ». Savoir regarder les personnes et les choses comme si c’était la première fois, une découverte.

Découvrir, et c’est la deuxième condition, c’est accepter d’être surpris. Accepter de ne pas savoir ou peu. Aristote disait : « la philosophie est fille de l’étonnement » in Métaphysique.

Découvrir c’est accepter d’être initié. Bien sûr, je peux le faire seul ; mais je peux aussi laisser mon frère, ma sœur, mon épouse, mon époux, mon enfant m’initier à cette relation unique avec elle, avec lui. N’oublions jamais que chacun d’entre nous a un jardin secret inviolable. Et je ne peux y accéder, tant que soit peu, que si l’autre m’y introduit, et donc m’y initie.

Enfin, pour pouvoir s’émerveiller, il faut savoir exorciser sa peur. La peur de ne pas pouvoir maîtriser les événements, les choses, et peut-être aussi, consciemment ou inconsciemment, l’autre. Autrement dit, la peur de l’inconnu, de l’inédit. Autrement dit, apprendre à faire confiance.

Frère Joseph (assistant régional)

Prions en confinement Semaine_2

« Père très Saint, avec Saint François d’Assise nous te supplions.
Au nom de Jésus-Christ donne-nous ton Esprit.
Répands-Le sur tous les hommes, toutes les femmes, et tous les enfants,
Sur la Création toute entière.
Qu’Il chasse la pandémie et restaure les corps et les cœurs.
Nous te le demandons à Toi qui vis pour les siècles des siècles.
»

Prière composée par fr Michel Laloux, ministre provincial, en cette période de pandémie.

Cette réflexion se fera, sœurs et frères, tout en continuant l’appel à la prière.

Comment François d’Assise voit-il l’humilité ?

Disons pour commencer, que l’humilité ne relève pas, chez François, de la morale. Elle est fondamentalement une donnée christologique : il voit l’humilité du Christ, et cela induit chez lui une manière d’être, pour lui ressembler.

L’humilité du Christ, il la voit dans trois événements majeurs :

L’incarnation :
« Ce Verbe du Père, si digne, si saint et si glorieux, le très haut Père du ciel annonça, par son saint ange Gabriel, qu’il viendrait dans le sein de la glorieuse Vierge Marie ; et de fait il reçut vraiment, dans son sein, la chair de notre fragile humanité. Lui qui était riche plus que tout, il a voulu, avec la bienheureuse Vierge sa mère, choisir la pauvreté ». (Lettre à tous les fidèles 4-5)

Le lavement des pieds :
« On ne donnera à aucun frère le titre de prieur, mais à tous distinctement celui de frères mineurs. Ils se laveront les pieds les uns aux autres ». (1R 6, 3)

L’eucharistie :
« Voyez : chaque jour il s’abaisse, exactement comme à l’heure où, quittant son palais royal, il s’est incarné dans le sein de la Vierge ; chaque jour c’est lui-même qui vient à nous, et sous les dehors les plus humbles » (Adm. 1, 16-17)

Ce désir de conformité avec le Christ se manifestera dans la connaissance de soi-même devant Dieu.
Barthélemy de Pise (franciscain, né en 1338 et mort en 1401) nous rapporte la prière suivante que récitait François :
« Mon Dieu et mon tout. Qui es-tu, très doux Seigneur, mon Dieu ? Et qui suis-je, moi, pauvre vermisseau, ton serviteur ? »
Prendre conscience de l’abîme qui le sépare de son Seigneur, le rend humble.

Être humble, être petit :
« Heureux le serviteur qui, lorsqu’on le félicite et qu’on l’honore, ne se tient pas pour meilleur que lorsqu’on le traite en homme de rien, simple et méprisable. Car tant vaut l’homme devant Dieu, tant vaut-il en réalité, sans plus ». (Adm. 20, 1-2)

Vouloir ressembler au Seigneur veut dire que l’humilité est un devoir :
« Ils doivent se réjouir quand ils se trouvent parmi des gens de basse condition et méprisés, des pauvres et des infirmes, des malades et des lépreux, et des mendiants des rues ». (1R 9, 1)

Cette vertu se traduit par la patience au moment de la contrariété :
« Heureux les pacifiques : ils seront appelés fils de Dieu. Ce qu’un serviteur de Dieu possède de patience et d’humilité, on ne peut le savoir tant que tout va selon ses désirs ». (Adm 13, 1)

Elle se traduit aussi dans l’acceptation de l’injustice envers soi :
« Heureux ceux qui ont l’esprit de pauvreté, car le royaume des cieux leur appartient.
Il y en a beaucoup qui sont férus de prières et d’offices, et qui infligent à leur corps de fréquentes mortifications et abstinences. Mais pour un mot qui leur semble un affront ou une injustice envers leur cher « moi », ou bien pour tel ou tel objet qu’on leur enlève, les voilà aussitôt qui se scandalisent et perdent la paix de l’âme
». (Adm. 14, 1-3)

Elle se traduit par la discrétion sur les grâces reçues et le bien qu’on fait :
« Heureux le serviteur qui amasse, mais dans le ciel, le trésor de grâces que le Seigneur lui offre et qui ne cherche pas, pour se faire valoir, à les manifester aux hommes ; Heureux le serviteur qui conserve en son cœur les secrets du Seigneur ». (Adm 28, 1.3)
« Heureux le serviteur qui ne se glorifie pas plus du bien que le Seigneur dit et opère par lui, que du bien que le Seigneur dit et opère par un autre
». (Adm 17, 1)

Cette humilité est tellement fragile que François demande à Dieu de la sauver :
« Dame sainte Pauvreté, que le Seigneur te sauve, avec ta sœur sainte Humilité » (Sal Vertus 2)

Frère Joseph (assistant régional)

Prions en confinement Semaine_1

« Père très Saint, avec Saint François d’Assise nous te supplions.
Au nom de Jésus-Christ donne-nous ton Esprit.
Répands-Le sur tous les hommes, toutes les femmes, et tous les enfants,
Sur la Création toute entière.
Qu’Il chasse la pandémie et restaure les corps et les cœurs.
Nous te le demandons à Toi qui vis pour les siècles des siècles. »

Prière composée par fr Michel Laloux, ministre provincial, en cette période de pandémie.

Cette réflexion se fera, sœurs et frères, tout en continuant l’appel à la prière de la semaine dernière.

Cette semaine, nous voulons faire un pas en avant et nous poser la question de l’humilité :

« Humilité, parce que beaucoup de nos certitudes sont mises à mal aujourd’hui. Parce que nous voyons les limites de ce que nous croyions savoir, parce qu’il nous faut plus que jamais être « humbles et soumis à tous », ne pas fanfaronner en bravant les consignes et en nous disant que nous en avons vu d’autres, que nous n’allons pas nous empêcher de faire notre jogging si ça nous chante, que la liberté, quand même… » Michel Sauquet – édito.

Ce confinement restreint énormément notre liberté. Pas seulement à l’extérieur, mais aussi chez soi. Prenons deux exemples qui appellent à une démarche d’humilité.

Parlons cash : quand mon époux, mon épouse, mon ou mes enfants finissaient par me taper sur les nerfs, j’avais la possibilité de prendre mon sac et m’éclipsait, ou leur demandais d’aller faire un tour.

Aujourd’hui, avec le confinement, cela est impossible. Et nous sommes appelés à rentrer dans cette démarche d’écoute, d’approfondissement de la connaissance de l’autre dans lequel il y a toujours une part de mystère, de découverte, d’abnégation. Réalités qui font partie intégrante de l’humilité.

Chacun d’entre nous est appelé aussi à rentrer en relation avec lui-même :
Avant, par exemple, pour ne pas broyer du noir, nous allions au cinéma, au théâtre, au musée, ou tout simplement marcher. Nous nous donnions à corps perdu dans notre travail, dans nos engagements associatifs, paroissiaux… Façon de fuir le face à face avec soi.

Dans cette période de confinement, cela est désormais impossible. Nous sommes donc invités à découvrir qui nous sommes, humblement, sous le regard de notre Créateur, autrement dit en vérité. Vivre avec nos travers, mais surtout découvrir nos beautés, nos grandeurs et en rendre grâce.

Ce ne sont que deux réalités parmi tant d’autres.

Fr Joseph Banoub (assistant régional)