Un discours de révélation

Comme toujours, chez Jean, ce chapitre 5 comporte une catéchèse, c’est à dire un enseignement concernant la véritable identité de Jésus.
Jésus fait aux juifs une « révélation », il leur laisse entendre des choses qu’ils étaient incapables de soupçonner.

I. Dieu a un Fils Unique, qui est son confident parfait, dans une intimité parfaite.

  • Dieu n’est pas solitaire dans sa divinité. A l’intérieur même de sa divinité, il a un Fils, un unique « Il appelait Dieu son propre Père » (18).
  • Ce Fils n’est pas son double, comme une image dans un miroir. C’est un Autre… mais qui reçoit tout de son Père, et lui correspond fidèlement en tout. Cette relation de dépendance n’est pas une sujétion, car elle est fondée sur la contemplation du Père « … ce qu’il voit faire au Père… » (19) et sur l’amour « … car le Père aime le Fils » (20).
  • Ce qui se passe à l’intérieur de la divinité se donne à voir dans le monde par l’action du Fils qui est Jésus de Nazareth « Ce qu’il voit faire au Père, le Fils le fait pareillement » (19c).
  • Une des conséquences, c’est que la transparence totale du Père et du Fils sous-entend que l’œuvre ici-bas de Jésus est pour nous une ouverture sur le mystère de Dieu. Il fait voir Dieu.

II. Ce Fils est l’égal de Dieu, car il a les pleins pouvoirs de Dieu.

  • Cette prétention est une horreur, un blasphème pour un juif, tout entier pénétré de l’unicité de Dieu.
  • Pour les juifs, Dieu n’a pas de rival (ceci contre la cosmogonie mésopotamienne et son dualisme « dieu du bien / dieu du mal).
  • Dieu ne partage pas ses responsabilités (contre le polythéisme grec, où il y avait un dieu pour la guerre, un autre pour l’amour, un autre pour le commerce…).
  • Dieu, tout au plus, peut choisir certaines de ses créatures comme chargées de mission (les anges, les prophètes, les rois…), mais jamais avec ‘pleins pouvoirs’.

III.  Jésus a les « pleins pouvoirs » de Dieu.

1. Comme le Père, il « possède la vie en lui-même » et peut donner la vie.

Au plan physique d’abord. Par nature, l’homme est soumis à la loi de l’entropie, c’est à dire de la dégradation universelle, de l’usure physique qui le mène peu à peu vers la mort.

Seul Dieu, qui est maître de sa création, dispose de la force contraire qui revitalise.

Or Jésus affirme qu’il en dispose aussi « en lui-même » :

  • il guérit (il revitalise le paralytique)
  • il laisse prévoir la résurrection de Lazare, et sa propre résurrection (21)
  • il annonce que c’est à sa voix que les morts ressusciteront au dernier jour (28).

2. Ce qui vaut au plan physique, vaut aussi au plan moral et spirituel. Par nature, livré à lui-même, l’homme se crispe sur lui-même, se bouche les yeux et les oreilles (ils ont des yeux et ne voient pas, des oreilles et n’entendent pas). Ici, c’est le verbe ‘écouter’ qui est utilisé. C’est la mort spirituelle.

Seul Dieu, dit l’Ecriture, peut transformer nos cœurs de pierre en cœurs de chair.
Or Jésus affirme que « si l’on écoute sa parole, on a la vie éternelle ».

3. Comme le Père, il dispose du pouvoir d’exercer le jugement.
C’est à dire de porter la sentence de condamnation, mais aussi d’en prémunir ceux qui, dès aujourd’hui, « écoutent sa parole » (22.24).

Conclusion

1. En Jésus, nous savons que le futur a déjà commencé :
Dans la mentalité juive, on ne mêle pas le temps et l’éternité. Pour nous, le temps se déroule et se déroulera jusqu’à ce que sonne la fin. A ce moment sonnera l’Heure solennelle de Dieu, où YHWH rendra son Jugement : soit faire vivre à jamais, soit condamner à la mort éternelle.

Or Jésus laisse entendre que le Père lui a remis le pouvoir d’anticiper ces 2 choses :
• de garantir ceux qui croient en lui contre toute sentence
• et de les assurer qu’ils vivront à jamais.

2. Jean nous laisse entendre, devant une telle intimité, devant de tels pleins pouvoirs, devant cette anticipation de l’éternel dans le temporel, que Jésus, loin d’être un simple chargé de mission, est l’expression même de Dieu dans le monde, ce qu’on pourrait appeler sa visibilité, et comme dit la préface de Noël : « Dieu rendu visible à nos yeux ».

Fr Joseph