Voilà 2 ans que je suis engagée en tant que bénévole au « resto du cœur », espace bébés (distribution pour des enfants de 0 à 18 mois).
Ce témoignage me donne l’occasion de faire le point sur cet engagement, mes joies, difficultés à assumer ce service.
Ayant travaillé dans la petite enfance, une ancienne collègue psychologue m’a sollicité pour rejoindre l’équipe de bénévoles. J’ai répondu « oui » rapidement à cette proposition. Après une vie professionnelle consacrée à la petite enfance, l’occasion m’était de nouveau donnée d’accueillir et d’accompagner parents et jeunes enfants.
L’équipe de bénévoles est riche par sa diversité, croyants et non croyants avec des parcours professionnels très différents. Les échanges sont riches et se font dans le respect de chacun, il y règne un esprit d’équipe. La richesse des expériences de chacun nous aide à améliorer notre accueil.
Quelles que soient les raisons de l’engagement de chacun, nous sommes tous là pour apporter de l’aide aux personnes en difficultés, mais aussi et surtout pour vivre la solidarité avec les bénéficiaires et entre bénévoles.
Mon travail est d’accueillir dans un espace de jeux les enfants que le parent peut nous confier pendant le temps où il retire les denrées qui lui sont nécessaires. C’est aussi un temps où il peut se poser, échanger, se détendre dans l’espace de convivialité autour d’une boisson chaude. Si la séparation est difficile pour l’enfant, le parent n’est jamais très loin… Mon rôle est de créer un lien de confiance et d’accompagner l’enfant dans ses découvertes, de l’aider à se poser et à respecter quelques consignes. Ma satisfaction est de voir comment l’enfant aime retrouver ce lieu chaque semaine ; rapidement, le parent nous le laisse avec confiance. Pour moi l’accueil est important d’autant que nous ne connaissons rien de l’histoire de ces familles et qu’un geste, une parole, un regard peuvent laisser des traces. Souvent ces familles sont de passage et changent fréquemment de lieux d’accueil. Il me faut faire preuve d’humilité et accepter de ne pas faire du travail sur du long terme.
Mon rôle peut être aussi de trier du linge et de préparer des trousseaux, mais aussi de trier et compléter des jouets et livres pour jeunes enfants.
Pour moi, respecter le bénéficiaire, c’est :
• l’accueillir dans un espace propre, convivial et chaleureux,
• respecter ces choix, ses goûts,
• en proposant du linge et du matériel de puériculture propre et correct,
• en proposant aux enfants des jeux complets et adaptés à leur âge.
Ce que je retiens de cette expérience, c’est qu’il s’agit souvent de rencontres brèves.
Pour celles qui vivent dans un même lieu d’hébergement, c’est le groupe qui se présente à nous, alors il est très difficile de faire de l’individuel, elles communiquent entre elles et ne sont pas en lien avec nous. Avec d’autres, l’échange est plus facile et elles font part de leurs besoins.
Mon objectif, c’est d’observer et d’aller vers la personne en retrait pour parler avec elle et saisir ses besoins. Etre bienveillante et à l’écoute.
Malheureusement la pandémie a eu beaucoup d’impacts négatifs : les bénéficiaires ne peuvent plus rentrer dans le local, la distribution se fait à l’extérieur (plus de moment de convivialité…). Les enfants ne peuvent plus être accueillis. Une distance doit être maintenue, alors que ces personnes ont besoin d’être mises en confiance. Le masque accentue cette distance, il n’y plus que le regard comme support à la communication. Ma plus grande difficulté est d’accepter les limites de cet échange, de maintenir la distance, et ne pas se toucher…. Les familles n’ont plus la possibilité de choisir le linge de leur enfant, le trousseau est préparé à l’avance et remis dans des sacs plastiques transparents (et non plus des sacs poubelle, heureusement !!!!)
Ma plus grande joie est de voir l’effet de surprise et le sourire des enfants au moment où je leur remets un jeu, un livre….
Cette expérience me fait réfléchir sur la « pauvreté » dont parle St François. Nous sommes tous pauvres de quelque chose ; pour moi, pauvre de ne pas trouver la bonne attitude, la bonne parole. Mettre de côté mes peurs et mon jugement.
Seul, nous ne pouvons rien faire. Il s’agit de voir en chaque personne (bénéficiaire et bénévole) un Frère.
Elisabeth