la dimension franciscaine de pause et partage

Une expérience de fraternité

Chacun d’entre nous a expérimenté en fraternité combien cela peut faire du bien de pouvoir dire à d’autres ce qui vous pèse, les questions qui nous taraudent et de trouver des interlocuteurs bienveillants qui écoutent sans jugement, donnent leur point de vue sans rien imposer et partagent avec nous leur expérience humaine et spirituelle. Nous avons voulu offrir à d’autres ce que nous recevons dans notre fraternité et le faire à plusieurs. Souvent, dans une fraternité franciscaine, chacun a ses propres engagements à l’extérieur et pratique le service du frère selon ses dons et ses choix. Mais il y a dans l’ADN de l’expérience franciscaine cet envoi sur les routes à deux ou trois pour annoncer la Bonne Nouvelle. C’est un choix intermédiaire entre l’engagement individuel et l’engagement collectif de toute une fraternité dont nous rêvons parfois mais qui pourrait avoir quelque chose de contraignant et d’uniformisant.

A plusieurs, nous sommes plus forts pour affronter ce qui est difficile dans le service que nous assumons ensemble et pour chercher à le faire dans un esprit franciscain. Nous pouvons mieux prendre de la distance par rapport à nos réactions trop personnelles ou émotionnelles. Nous échangeons entre nous sur les questions que nous nous posons à propos de notre positionnement vis-à-vis des personnes que nous accueillons. Jusqu’où pouvons –nous les aider, répondre ou non à leurs demande ? Et ce n’est pas facile de résister à certaines demandes quand nous nous mettons à la place de ceux qui les formulent. Nous veillons dans cette perspective à orienter nos hôtes vers d’autres aides extérieures au groupe, notamment des associations, pour tout ce qui dépasse nos compétences et nos forces. Nous ne sommes pas psy, ni assistants sociaux, ni conseillers juridiques. Mais ce que nous pouvons faire ensemble, c’est donner l’occasion d’expérimenter la richesse et la fécondité des relations fraternelles, même si chacun de nos hôtes peut croire en arrivant qu’il ne peut rien pour l’autre.

C’est merveilleux de voir nos invités après un certain temps, se proposer de sortir ensemble ou échanger des adresses utiles ou s’apporter d’autres formes d’aide par exemple du soutien scolaire pour un enfant en difficulté. Cela exige de notre part de rester très discret, de ne rien forcer, de laisser mûrir les choses et naître les initiatives. Tout ce qui peut être perçu comme incitation moralisante est démobilisateur et culpabilisant mais La fraternité vécue est contagieuse, elle donne de la joie, du courage, l’envie de vivre et d’être soi-même avec les autres.

Nous sommes conscients des limites de l’aide que nous pouvons apporter. Personne ne peut porter la croix de l’autre mais seulement le soutenir comme Simon de Cyrène. Nous nous rappelons la parole de Jésus : «En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire »( Jn 15,5) C’est pourquoi nous tenons à proposer au groupe ce temps de ressourcement l’après-midi où chacun peut approfondir ou renouer sa relation avec le Christ, déposer sa vie devant lui, et la relire en sa présence, apprendre à Lui faire confiance, à s’appuyer sur Lui . Il s’agit aussi pour ces personnes qui se posent des questions sur leur vie et sur elles-mêmes, de se sentir accueillies et aimées par l’Eglise et dans cette perspective, la présence et les prises de parole de frère Joseph sont essentielles. IL représente l’autorité de l’Eglise et nous laïcs, nous ne pouvons pas le faire seuls. Chacun doit travailler à sa juste place.

Pause et partage, c’est une grande école de dé-maîtrise. A chaque rencontre, nous ne savons pas quels seront les frères et sœurs qui nous seront donnés, nous sommes impuissants devant certaines situations et certains choix, nous devons nous incliner devant la liberté de l’autre et le secret de ses motivations malgré l’inquiétude que nous pouvons ressentir pour eux et pour les enfants. Heureusement, les liens fraternels entre les membres de l’équipe nous aident à avancer à travers ombre et lumière. C’est la fraternité vécue entre nous qui nous aide à vivre la fraternité plus largement et à transmettre par delà nos propres forces cette expérience de la force de la fraternité qui peut s’étendre de proche en proche lorsqu’on a eu la grâce de la vivre.

Témoignage de Marie-Agnès Fleury, de l’équipe d’animation de Pause et Partage