Je suis la porte = Le passage obligé
La prétention devait paraître exorbitante. Il faut pourtant la prendre pour ce qu’elle est, ne pas la minimiser. Jésus déclare : il n’y a pas d’autre sauveur que moi, et tous ceux qui veulent être sauvés doivent passer par moi !
Pierre, devant le Sanhédrin dira : « … Il n’y a pas sous le ciel d’autre nom donné aux hommes, par lequel il nous faille être sauvés » (Ac. 4, 12).
Jésus prétend donc être le seul qui puisse nous faire passer d’un état à l’autre :
- non seulement de l’état de pécheur à l’état d’homme « convenable »
- mais de l’état d’homme convenable à l’état filial, c’est à dire selon le cœur du Père.
Ceci a des implications concrètes :
- passer du sens de la justice ……………………. au sens de la miséricorde
- passer de la vie honnête et droite ………….. au don de sa vie
- passer de mesure ……………………………………. à l’illimité
- passer du faire par devoir ……………………….. à la gratuit
- passer de la satisfaction de se réaliser par soi-même …. au sens de se recevoir d’un Autre.
Le salut n’est donc pas seulement le fait d’être sauvé du péché, mais la grâce de pouvoir accéder au statut de frère du Fils bien-aimé, de quelqu’un qui porte lui aussi les traits et la ressemblance du Père des cieux. Seul le Fils peut nous faire devenir fils et filles.
Le rôle de la porte et du passage obligé, c’est aussi pour le Christ le rôle de rassembleur universel : « J’ai encore d’autres brebis qui ne sont pas de ce bercail… », c’est à dire plus loin que le peuple juif, à savoir les païens. Ils sont aussi l’objet du dessein du Père. Plus vaste que le peuple de l’Alliance, il y aura l’Alliance des peuples.
Le passage obligé que représente Jésus, c’est aussi pour les juifs, ses auditeurs, le passage obligé d’une conception du Messie à une autre. Il est frappant que Jésus n’évoque pour ainsi dire jamais les satisfactions matérielles et politiques. Au contraire, il parle d’un bon berger qui va jusqu’à « donner sa vie pour ses brebis ». Et plus loin : « personne ne me l’enlève, mais je m’en dessaisis de moi-même. »
Jésus Messie, c’est donc Jésus qui va mourir. Consciemment, Jésus endosse ici la livrée du Serviteur Souffrant, dont parlait Isaïe 53, celui dont le sacrifice expiatoire allait sauver la multitude. Victime substitutive de la multitude, Jésus est effectivement le seul par lequel nous devions être sauvés.
Le Père… le Fils… les Brebis
Dans ce passage, un personnage est évoqué plusieurs fois, celui du Père : 15.17.18.25.29.30
On a nettement l’impression qu’il est le personnage central :
• la « vie éternelle », c’est la vie filiale selon le cœur du Père
• le rassemblement universel, c’est le dessein ultime du Père
• la connaissance que Jésus a des siens est semblable à celle qu’il a du Père
• le don de sa vie se fait selon l’acquiescement du Père
• ses œuvres, il les opère au nom de son Père
• le Père, c’est celui à qui on n’arrache rien
• le Fils ne fait qu’un avec le Père.
>> Si le Père est le personnage central, c’est parce qu’il est la référence ultime de cette intimité si clairement affirmée de Jésus et des siens.
Tout ce passage du « Bon Pasteur » pourrait se résumer par la formule : « Ce qui va se passer entre Jésus et les siens, c’est précisément ce qui se passe déjà entre le Père et Jésus ».
• c’est vrai de la connaissance réciproque (connaître = être en intimité avec) (v. 14)
• c’est vrai aussi de ce que représente cette intimité : « personne ne pourra m’arracher mes brebis, comme personne ne peut arracher quelque chose de la main du Père » (v. 29)
• c’est vrai, enfin, de l’unité du troupeau (v. 16) qui se devra tout entière à l’unité qui existe entre le Père et le Fils (v. 30).
Conclusion
Il s’agit, dans ce chapitre, d’une révélation théologique sur l’essence de la vie spirituelle dans l’Eglise. Cette vie spirituelle dès ici-bas a son fondement dans les cieux : il se passe entre Jésus et nous quelque chose d’identique à ce qui a lieu au sein de la Trinité.
Fr Joseph