Antonin Bajewski

Ils furent plus d’un million à mourir entre le 27 avril 1940 et le 27 janvier 1945. La plupart moururent d’être nés juifs mais d’autres périrent de leur opposition au totalitarisme nazi. Un certain nombre étaient des religieux chrétiens venus des quatre coins de l’Europe. Certes, Dachau fut le lieu privilégié d’internement des ecclésiastiques[1] mais d’autres lieux les « accueillirent ». Si la figure de Maximilian Kolbe hante les murs du plus grand camp de concentration et d’extermination du IIIe Reich, les franciscains martyrs de Niepokalanów[2] furent au moins 6.

Niepokalanów, le château de Marie, située à Teresin, 40 kilomètres à l’ouest de Varsovie, fut fondé en 1927 par Saint-Maximilien Kolbe. C’est en effet en ce lieu que Kolbe y installa le siège de la Chevalerie de l’Immaculée, association mariale. Avant la seconde guerre, 760 frères franciscains vivaient au monastère qui était un lieu de publication de magazines religieux et un centre radiophonique. La guerre conduisit les frères à accueillir des soldats blessés et des réfugiés, de toutes confessions. La répression nazie s’abattit donc sur eux. Parmi les frères, l’un d’entre eux partagea le sort de Maximilan Kolbe : Jan Eugen Bajewski.  Il était né à Vilnius en Lituanie le 17 janvier 1915. Il montra de belles aptitudes scolaires et maîtrisait plusieurs langues. Après de solides études et malgré de vives réticences de sa famille, il décida en juin 1933 de se consacrer à Dieu. Certain de sa vocation, il hésita toutefois entre la prêtrise diocésaine et le clergé régulier. Échangeant avec ses coreligionnaires du séminaire de Vilnius, il considéra que l’appel à la vie religieuse était si intense qu’il quitta le séminaire pour rejoindre les conventuels franciscains[3]. Il fut admis le 17 août 1934 au sein de la Province polonaise sous le nom de frère Antonin. Il effectua son noviciat à Niepokalanów et prononça ses vœux temporaires en septembre1935 puis partit au séminaire franciscain de Cracovie[4] afin d’étudier la théologie. Il s’engagea définitivement en novembre 1938 et fut ordonné prêtre en mai 1939 et rejoignit Niepokalanów. Très rapidement, Maximilian Kolbe le choisit comme vicaire. Il manifesta une foi profonde, une grande douceur vis-à-vis des autres. De santé fragile, il fut admis durant les premiers mois à l’infirmerie située à quelques kilomètres de la communauté. Il y fut surpris par le déclenchement des hostilités en septembre 1939, ce qui lui permit d’échapper à l’arrestation frappant la plupart des frères de la communauté. Pourtant, il fut arrêté avec Maximilian Kolbe et trois autres frères et enfermé à la prison Pawiak de Varsovie. Durant cette détention, il soutint spirituellement les autres prisonniers et offrit ses rations de nourriture. Bien que cela fut une cause de mauvais traitements, il conserva ses habits franciscains et fut transféré début avril 1941 à Auschwitz. Il fut sauvagement battu à son arrivée, tatoué du numéro 12764. Rapidement il fut malade du typhus, continua pourtant à se dévouer aux autres au péril de sa vie et mourut le 8 mai 1941. Avant de rendre son dernier soupir, lors de son ultime confession, il dit au frère Szweda : « Dites à mes frères de Niepokalanów que je suis mort en fidélité avec le Christ et la Vierge Marie ». Il fut béatifié par Jean-Paul II parmi les 108 martyrs de la seconde guerre mondiale par le 13 juin 1999.

Érik Lambert.


[1] G.Zeller, La Baraque des prêtres, Dachau, 1938-1945, Paris, Tallandier, 2017, 320 pages.
[2] Béatifiés par Jean-Paul II le 13 juin 1999. M.Kolbe canonisé en 1982.
[3] Les Frères Mineurs Conventuels constituent une des trois branches de l’Ordre fondé par Saint François d’Assise sous le nom de ‘Frères Mineurs’. La qualification ‘Conventuels’ a été ajoutée, provient du latin ‘cum venire’ qui signifie se réunir. Ce sont donc des frères qui vivent dans des couvents.
[4] http://www.lamortdanslart.com/danse/Pologne/dmcracovie.htm http://www.krakow.travel/fr/226-krakow-bernardine-church