Le déclenchement de la guerre, qui fut qualifiée de « grande guerre, fut l’aboutissement du fonctionnement parfait, quoique surprenant ; d’un funeste engrenage constitué par les alliances entre pays européens : triplice d’une part, triple entente d’autre part. Une fois les rouages en mouvement, rien ne put arrêter le désastre. Les Allemands appliquèrent le plan conçu avec la rigueur d’un horaire de chemin de fer ; mode d’action prévu par l’ancien chef d’état-major des armées allemandes entre 1891 et 1905, le général Alfred von Schlieffen. Il était prévu que les troupes du Kayser obtiendraient libre passage par la Belgique pour manœuvrer en direction de la France. Las ! les Belges offrirent une résistance imprévue, ce qui nourrit une violente réaction des Allemands. Contraints de s’emparer des douze forts belges qui protégeaient la ville de Liège, confrontés à la résistance du lieutenant-général Leman, il fallut aux troupes du général von Emmich mettre le siège devant la ville. Face à une résistance acharnée autant qu’inattendue, les atrocités allemandes furent légion au début août 1914. Lors de cet épisode tragique, un officier d’artillerie nommé Édouard Lekeux s’illustra et offrit ensuite un témoignage des événements qu’il vécut alors. Rien d’original à cela, tant les souvenirs des acteurs constituèrent une production littéraire conséquente, mais le caractère particulier de Mes Cloîtres dans la tempête[1] tint à son auteur : un prêtre franciscain. En effet, né en 1884 à Arlon dans la province belge de Luxembourg, il réalisa de brillantes études au sein de l’Athénée, de la communauté francophone belge. Cette dénomination était inspirée de l’Athenaeumimaginée par l’empereur Hadrien en lien avec ce qui était au II°siècle après JC, considéré comme le « modèle culturel absolu » : Athènes. Édouard Lekeux devint officier d’artillerie avant d’entrer en religion en 1911 dans l’ordre des frères mineurs sous le nom de Martial. Il fut ordonné en 1920 après l’expérience qu’il vécut avec « ses frères, les poilus ».
Il décrivit ensuite sa « Manière franciscaine de faire la guerre », son expérience qui inspira son cheminement spirituel : dialogue fréquent avec Dieu, avec Saint-François face au déchaînement de violence d’un conflit monstrueux [2]. Participant à la défense de l’Yser, décisive pour soutenir les efforts consentis lors de la première bataille de la Marne, il fut à Dixmude à l’automne 1914. Il contribua donc à éviter à l’armée belge l’encerclement, permettant ainsi à l’armée française de résister aux tentatives d’enfoncement du front avant sa consolidation jusqu’à la fin de la guerre. Cette bataille de Dixmude marqua en fait l’arrêt de l’invasion allemande. Il raconta ensuite son action courageuse lorsqu’il défendit le clocher du village de Oud-Stuivekenskerke, un poste d’observation stratégique cible des artilleurs allemands[3]. Une chapelle évoque encore cet épisode[4].
ÉRIK LAMBERT
[1] https://mondieuetmontout.com/Menu-Pere-Martial-Lekeux-Mes-Cloitres-dans-la-tempete.html
[2] La guerre de tranchée conduisait à des corps à corps qui pouvaient s’achever à la pelle ou à la pioche. Ce pouvait aussi être des sapes comme en porte la trace le front de la somme (Lochnagar Crater (trou de la gloire) à La Boisselle https://france3-regions.francetvinfo.fr/hauts-de-france/le-trou-de-mine-de-la-boisselle-lochnagar-crater-trou-de-gloire-un-symbole-de-la-grande-guerre-et-la-propriete-d-un-anglais-1038687.html ) ou l’épisode du tunnel de la mort au Chemin des dames en Champagne (1917) https://www.lemonde.fr/international/article/2020/11/16/mystere-de-la-guerre-de-14-18-le-tunnel-du-winterberg-livre-ses-premiers-secrets_6059854_3210.html
[3] https://mondieuetmontout.com/Pere-Martial-Lekeux-o.f.m.-Histoire-d-une-tour.html
[4] https://www.rtbf.be/14-18/article_oud-stuivekenskerke?id=8295420