Edito mars

Le 1700e anniversaire du Symbole de Nicée (325)

C’est un événement considérable pour l’Église d’aujourd’hui, nous expliquons pourquoi.

Qu’est-ce qu’un symbole de foi ? C’est une formule destinée à exposer en résumé l’essentiel de ce qu’il faut croire pour être considéré comme chrétien. La nécessité du symbole remonte à l’origine même de l’église chrétienne : des petites communautés de croyants rassemblés à partir de la prédication et de l’initiative d’un apôtre ou d’un de leurs disciples, répandues à travers tout le monde antique, surtout le monde gréco-romain, mais bientôt asiatique, africain et européen ; Ces communautés étaient environnées de païens dont il importait de se distinguer. Quand un baptisé voyageait et se présentait dans une autre communauté chrétienne, il était nécessaire de le reconnaitre, alors que des divergences doctrinales avaient déjà vu le jour (gnostiques, docètes, subordinatianistes etc…).

Chacune des communautés avait sa formule propre pour dire : « Dieu-Créateur, son Fils unique Jésus-Christ, sauveur des hommes par son incarnation, sa passion et sa résurrection. L’Esprit-saint qui unifie les croyants dans une unique église qui transmet la rémission des péchés, la sanctification et la foi en la vie éternelle. » Ces formules échangées entre les communautés chrétiennes s’étaient ajustées progressivement les unes aux autres pour être intégrées dans la catéchèse et la liturgie baptismale.

Au début du IVe s. Arius un prêtre d’Alexandrie, célèbre prédicateur et instruit de la philosophie grecque rechercha une expression plus compréhensible, selon lui, pour parler de l’Incarnation du Christ. Il enseignait que Jésus, Fils de Dieu, avait été créé avant les autres créatures, comme intermédiaire entre Dieu et ses créatures, il n’était donc pas lui-même Dieu au même titre que le Père, mais seulement associé au divin, de par son origine. En raison de son succès oratoire, cette explication séduisit un grand nombre de chrétiens d’Alexandrie, puis de là, des chrétiens d’autres églises asiatiques. Des discussions et des querelles s’ensuivirent au point d’inquiéter l’empereur Constantin nouvellement converti, mais non encore baptisé. Il souhaitait l’apaisement et l’unité de la communauté chrétienne, à travers son empire. Il convoqua donc une assemblée des évêques, en 325, pour formuler une expression commune de la foi chrétienne. Le nombre des évêques présents, selon les diverses sources varie entre 230 et 318. Malgré d’intenses disputes, le diacre Athanase, soutien de l’évêque Alexandre d’Alexandrie qui avait condamné Arius, parvint à faire admettre sa profession de foi par l’ensemble des évêques, sauf deux qui quittèrent l’assemblée. Ce fut le premier Concile œcuménique, dont le symbole servit de matrice aux symboles publiés par les conciles suivants. A partir du 5e siècle, après apaisement des querelles, il devint le symbole officiel de la liturgie chrétienne, surtout baptismale.

Portée œcuménique
Et il demeure, jusqu’aujourd’hui la référence essentielle des églises chrétiennes, comme pour le Conseil œcuménique des églises chrétiennes, fondé en 1948 qui rassemble plus de 300 communautés ecclésiales et a comme critère d’appartenance : « l’Église professe la foi dans le Dieu trinitaire selon les Écritures, et telle que cette foi est reflétée dans le Symbole de Nicée-Constantinople. » C’est dire sa portée œcuménique, car toute tentative de rencontre pour un retour à l’unité chrétienne, part de cette formule de foi.

La Fédération protestante de France et l’église grecque orthodoxe dans son ensemble se réfèrent donc à ce symbole ; avec cependant deux restrictions : La traduction française « catholique » du mot grec « Katholicos » qui signifie bien « universel », mais qui a le tort à leurs yeux de faire référence privilégiée à l’église romaine ; et l’expression « Filioque » ajoutée au IXe siècle au symbole de Nicée-Constantinople, sur une initiative de Charlemagne qui légiféra en liturgie pour l’ensemble de son empire. C’est le lieu d’un débat encore actuel entre les églises d’Occident et les églises d’Orient.

Actualité du symbole de foi.
Dans la société contemporaine fortement sécularisée, où beaucoup de chrétiens se contentent d’une expression approximative de leur foi et n’hésitent pas à se forger, pour chacun, sa propre conception doctrinale, il est important de se référer à une valeur sûre, une formule qui remonte à l’origine de l’Église, professée par l’ensemble des chrétiens qui se reconnaissent dans cette profession de foi. Pour la catéchèse d’aujourd’hui, il est urgent d’exposer et d’expliquer cette base catéchétique que nous avons accueillie lors de notre baptême et qui nous permet, dans notre prière de nous approcher avec sûreté du vrai Dieu, vivant et vrai, Père Fils Esprit Saint, auteur de la création et du salut de tous les hommes, manifesté et réalisé en son Fils Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme qui nous promet la vie éternelle en communion avec Dieu et avec l’humanité sauvée.

N-B. Pourquoi le retour à l’expression « consubstantiel au Père »

Il est vrai que c’est un mot difficile. Une première traduction qui a eu cours pour les pays francophones, entre le Concile Vatican II et 2019, semblait écarter cette difficulté en proposant « de même nature que le Père ». Mais cette traduction entraînait une ambiguïté, car elle exprimait bien le caractère divin du Christ, mais pouvait être comprise comme s’appliquant à deux êtres différents, de même que Pierre et Jacques sont possesseurs de la même nature humaine, mais sont deux individus différents. On a donc préféré revenir au texte d’origine… qui cependant suppose une catéchèse pour chaque génération.

F. Luc Mathieu, ofm
Paris 2025